« Exercice intrusion » ou l’évaluation des personnels
Dans un état de guerre, comme celui que l’on impose aux enseignants et à la société dans son ensemble, celui que la presse relaye avec délectation et que certains d’entre nous acceptons passivement en tant que bons fonctionnaires, la bêtise n’a pas de limites. Mais, guerre contre qui ? Contre les descendants des colonisés ? Contre ceux qui ont failli perdre la vie dans leur propre pays et ensuite en traversant la mer dans des bateaux de fortune ?
Pas d’angélisme mais pas de relents patriotico-fascistes non plus.
Le complexe du colon va loin. Trop loin. Et la bêtise aussi. Pour preuve, ce qui s’est produit lors d’un de ces exercices imposés par les va-t-en guerre dans un collège dont nous ne citerons pas l’académie et encore moins le département. Disons seulement qu’il s’appelle Jean-Philippe Rameau, qu’il est géré comme le gouvernement le souhaite : avec main de fer, en pratiquant le harcèlement contre tous les personnels, en étant pionnier dans la politique d’enfumage du ministère (réforme, délation, notation à la tête du client, espaces haute technologie, observation et notation entre collègues, IMP distribués entre copains, vol de droit d’auteur entre collègues, parties de pétanque entre les bien-vus et la cheffe, etc.)
Lors du dernier exercice contre une hypothétique intrusion de terroristes barbus (pas le Che, Marx ou Engels, bien entendu), la chef a dit que « ce sera (mode Indicatif) au nombre de cercueils alignés dans la cour que l’on pourra dire si on a été bons ou pas ». Cela veut dire qu’elle compte sur un attentat dans son établissement. Ces propos ont été tenus lors de la préparation de l’exercice et n’ont ému que peu de collègues, tellement le mougeonisme (moitié mouton, moitié pigeon) a gagné les cervelles, nos cervelles.
Le jour du carnaval des conneries -pardon, de l’exercice- l’intrusion a été annoncée avec une corne de brume. Il va de soi qu’elle n’a pas été entendue par tout le monde. Mais laissons ce petit détail de côté et passons à l’essentiel : Les profs on été observés par les gendarmes et par des parents d’élèves (dont un qui a vu son fils exclu de l’établissement il y a de cela quelque temps et les deux autres ne l’ont pas été grâce à la bienveillance ambiante). L’autre parent envoie des courriers aux profs dans lesquels il leur prodigue des conseils sur leur pratique…
Résultat : un meilleur ouvrier du mois a reçu les félicitations de la baronne, comme à Mc Do, et une prof qui, dès le lendemain avait une lettre sur son casier en lui annonçant que ce rapport serait inclus dans son dossier. Dans ledit rapport, on lui reproche d’avoir donné comme consigne à ses élèves de continuer de travailler mais en silence, de ne pas les avoir obligé à se barricader. Il faut savoir que dans cet établissement, les lumières sont équipées de détecteurs de présence, ce qui implique qu’elles restent toujours allumées.
A la corne de brume, il faut ajouter une directrice de Segpa qui se baladait avec un gilet jaune dans l’établissement pour contrôler le bon déroulement de l’attentat imaginaire. Des héros, il faut le dire. Des personnes capables de souffler sur la corne de brume ou de se promener en gilet jaune afin d’attirer l’attention des terroristes et de sauver ainsi élèves et personnels. On pourrait en rire.
Pendant ce temps, l’évaluation des profs nous guette et le syndicat majoritaire dans le secondaire, le SNES, y trouve (sa direction nationale) des aspects qui vont dans le bons sens… On n’est pas sortis de l’auberge!